Bla-bla-bla·Les looks

Comment Paris a détruit mon style (et comment j’ai décidé d’y remédier grâce au vintage)

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Bonjouuuur.

Plus le temps passe, plus je suis persuadée que le concept de « la Parisienne » n’a été imaginé que pour une seule raison: mettre une pression pas possible aux petites provinciales (comme moi) qui débarquent dans la capitale. Combien de filles sont arrivées dans cette ville, persuadées qu’il leur fallait la panoplie complète de Caroline de Maigret et autres Inès de la Fressange pour s’intégrer? Je vais vous le dire moi: des tas. Et c’est bien triste. Bien sûr que ces nanas existent, et sont à mon sens très belles et stylées, mais pourquoi cette légende comme quoi il faut à tout prix leur ressembler pour être dans la norme? Pourquoi sont-elles présentées de partout comme des objectifs à atteindre?

La vérité, c’est qu’à Paris, tu ne peux pas t’habiller chaque jour comme si tu allais siroter du rouge en terrasse à côté du Louvre, porter des talons de créateurs pour aller chercher ta baguette ou sortir faire la fête juste vêtue d’une mini-robe noire en velours sans collants en plein hiver. Franchement! On est déjà suffisamment stressées par le métro, par les mecs qui nous harcèlent tous les deux pas, par la pollution, et par les mecs qui nous harcèlent dans le métro pendant le pic de pollution. Sans oublier qu’avec la moitié de notre salaire qui part directement dans un loyer exorbitant, difficile de faire des folies au Bon Marché. Non mais vraiment. Qu’on nous lâche un peu la grappe avec cette idéal de « chic et d’élégance » qu’on nous (sur)vend de partout.

J’imagine qu’à ce point de l’article, vous vous demandez où je veux en venir et pourquoi je semble si lassée par tout ça. C’est que ce concept de Parisienne au look merveilleux-mais-sans-effort, il m’a pas mal miné le moral. Je vous raconte tout.

Le grand n’importe quoi

J’ai habité 23 ans dans le sud, à Cannes, avant de déménager à Paris. Je n’ai jamais été une bête de mode à proprement parlé: les tendances vont trop vite et moi, je mets trop de temps à les aimer, si bien que quand je commence à m’intéresser à l’une d’elle, le reste de la planète est déjà passé à une autre. Mais j’ai toujours aimé les fringues et cherché à cultiver mon petit style à moi – quitte à enchaîner les fautes de goût monumentales.

Mes années lycée, de fin 2006 à 2009, ont été rythmées par mon incapacité à choisir entre le style emo, le fluokid, le vintage (ben oui, déjà) et Gossip Girl. Un mélange intéressant (pas du tout), qui consistait en général à une petite robe à fleurs + des collants rose fluo + des Converses + des boucles d’oreilles tête de mort + un manteau tartan (il n’existe d’ailleurs que très peu de photos de cette époque, mon visage étant dévoré par l’acné).

Puis est arrivée la période post-bac où je suis partie étudier à Aix-en-Provence (je marque « étudier » mais j’ai surtout bu du rosé, fait la fête jusqu’au petit matin et décuvé en repostant des triangles et des photos de la galaxie sur Tumblr), et ai découvert la magie des friperies, leurs gilets multicolores et vestes à épaulettes que j’ai commencé à collectionner.

Après cette année festive mais foireuse, puis une seconde tentative ratée à la fac (de Nice, cette fois), je suis devenue caissière à plein temps afin de 1) faire quelque chose de ma vie 2) mettre des sous de côté pour me payer des études que je n’allais pas arrêter au bout de 3 mois. Avec mon argent gagné chez Leclerc, je pouvais enfin m’acheter touuuut ce que je voulais (dans la limite de mon découvert et des économies qu’il me fallait constituer, bien sur), et je me suis lâchée. Au programme: une belle collection de talons hors de prix signés Jeffrey Campbell, que j’associais à des pulls 80’s à paillettes et les shorts en cuir les plus courts du monde, issus de mes razzias dans les vide-greniers.

Clairement, j’étais complètement perdue (« QU’EST-CE-QUE-JE-VAIS-FAIRE-DE-MA-VIE-OMG »), et mes tenues assez folles voire incohérentes, à l’image de ce qu’il se passait dans ma tête. Mais quand je repense aux looks de cette période de ma vie, je n’ai aucun regret tant je me suis amusée et ai osé des choses que je ne pourrais sûrement plus me permettre aujourd’hui (oui, je pense à toi, body jaune fluo porté avec mon disco pant verni d’American Apparel sous mon manteau léopard).

L’équilibre avant la dégringolade

Mes années à l’école de journalisme ont été pour moi l’occasion de pousser une dernière fois les limites de mes looks avant d’arriver, ENFIN, à un équilibre stylistique: entre vintage et preppy, teintes pop et imprimés retro, jamais trop compliqué (je suis nulle en layering) ni trop sexy (parce que je ne suis pas à l’aise). Comme l’a un jour dit mon oncle Gaston, il faut « casser les couleurs ». Cette idée en tête depuis très jeune, je me suis toujours appliquée à « casser les couleurs », c’est-à-dire à mettre n’importe quoi avec n’importe quoi, et à croiser les doigts pour que ça passe. J’adore ouvrir mon placard et en voir dégouliner un arc-en-ciel de tissus, puis en rajouter une couche avec un lipstick rose fluo. Et là, j’étais comblée.

Et puis un jour, j’ai dû quitter ma Côte d’Azur chérie pour aller habiter à Paris. Et là, patatras. Que dire? J’ai eu un mal fou à m’adapter à cette ville et je trouvais que je détonnais terriblement. Je me suis dit qu’il fallait que je change pour mieux m’intégrer, et à partir de là, j’ai été aspirée dans une spirale infernale de quête de « perfection parisienne », qui a peu à peu effacé tout ce que j’aimais et tout ce qui faisait que j’étais moi. Alors bien sûr, on parle d’esthétique, et il serait superficiel de me réduire à mes fringues. Mais en ce qui me concerne, la manière dont je m’habille est un outil efficace pour avoir confiance en moi. Et là, c’était la catastrophe fashion totale.

En parallèle, j’ai arrêté de porter des talons vertigineux parce que les escaliers du métro sont trop raides et que pour fuir les harceleurs relous, c’est plus facile de courir en Adidas. Le gris, le noir et le bleu marine ont peu à peu remplacé mon jaune citron, mon rose fuchsia et mon vert menthe. Parce que je ne voulais pas faire tâche au milieu de toutes les autres filles que je croisais, parce que de toute façon à Paris il fait moche tout le temps, parce que j’en avais assez qu’on me dévisage. J’ai laissé mes pulls farfelus au fond de mon placard, et j’ai acheté des cols roulés gris à porter sous un blazer bleu marine.

Bref, je me suis uniformisée. Je suis devenue comme tout le monde mais en moins bien, parce que ça ne me ressemblait pas. Et j’étais bien ennuyée, parce que malgré tous mes efforts, je me sentais encore moins bien qu’avant. La vérité, c’est que je n’étais plus moi-même, juste la version ratée d’un fantasme alimenté par les magazines et Instagram.

Le déclic

Un jour, j’étais dans ma chambre en train d’essayer ma tenue pour le lendemain matin, une combi 80’s rouge super voyante, bouffante avec de grosses fleurs roses et des pois. Je me suis vite ravisée: « Non mais ça va pas, avec ce truc à 6h du matin dans le métro, c’est sûr que je vais me faire embêter par un ou deux mecs bourrés ». Et puis mon mec, qui m’observait du coin de l’oeil tout en jouant à la Playstation, sûrement agacé que je le déconcentre alors qu’il était en train de sauver le monde, m’a dit: « Nawal, même en jean et pull, tu pourrais te faire emmerder par des connards. Mets-la ta combi ». Et je me suis dit, « merde, il a raison ». Foutu pour foutu, quitte à devoir affronter le regard des blaireaux, autant le faire dans une tenue dans laquelle je me sens aussi forte que Wonder Woman, non?

Ce jour-là en arrivant au boulot avec ma combi vintage, une personne dont je suis secrètement fan de chacune de ses tenues s’est arrêtée, m’a regardée et m’a dit « Waouw, j’adore, tu devrais toujours t’habiller comme ça! », et bim. Je me suis dit, hé, mais je m’habillais toujours comme ça avant. Pourquoi est-ce que j’ai arrêté, alors que c’est si cool de se sentir soi-même en portant ce qu’on aime?

Au fil des semaines, j’ai commencé à retrouver le goût pour les imprimés bizarres, les talons mignons bien qu’ils ralentissent mes pas, les couleurs bien voyantes, les robes de pin-up. Et forcément, j’ai repris confiance en moi. J’ai recommencé à chiner dans les friperies et les vide-greniers, à acheter des pièces uniques et originales que j’allais enfin porter avec plaisir, sans avoir peur de détonner au milieu d’une foule de bleu marine et de gris, ou de me faire embêter. L’été qui a suivi, j’ai lancé mon blog pour, notamment, me motiver à continuer de cultiver mon style à moi. Et la suite, vous la connaissez ! 🙂

En conclusion…

Aujourd’hui, j’ai enfin (re)trouvé le style qui me va et dans lequel je suis vraiment « moi ». Evidemment, je regarde encore avec admiration celles à qui les looks « à la Parisienne » vont à ravir – je pense notamment à ma super-collègue Pauline Ducamp ainsi qu’à la jolie et ô combien chic Clémence Allaire, qui ont toutes deux réussi à s’approprier les codes de la capitale tout en cultivant quelque chose de très personnel.

Oh, et bien sûr que je porte encore des jeans noirs, des cols roulés gris et des blazers bleu marine. Tout simplement parce que c’est bien plus élégant et efficace, que, disons, une salopette flare rose des années 60 comme celle que je porte sur ces photos hahaha. Mais je ne me force plus à entrer dans un moule qui n’est pas fait pour moi et ça, et ben c’est chouette 🙂

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12 réflexions au sujet de « Comment Paris a détruit mon style (et comment j’ai décidé d’y remédier grâce au vintage) »

  1. You go girl! Je me retrouve dans ce que tu dis, j’ai tant essayé d’uniformiser mon look pour être « casual » quelques temps mais en fait ça ne me ressemblais pas… Et puis j’aime porter des fringues vintage, uniques, de me dire qu’une petite mamie a porté cette robe et que je lui donne une nouvelle vie aujourd’hui ! Bref être soi, ça fait du bien et j’espère réussir à porter une salopette flare rose un jour… En attendant, je continue de laisser mon style mûrir au fur et à mesure de mes envies 😉

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    1. Merci Cloe, ton commentaire me touche à un point que tu n’imagines même pas! Je suis heureuse de lire que je ne suis pas seule, et si un jour tu as envie de porter une salopette flare rose… je te prête la mienne avec grand plaisir ! ❤

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  2. Hahaha toi aussi tu as eu une période Gossip Girl !
    Franchement il y a trop de friperies pour se priver, moi c’est Paris qui m’a permis de me créer un style petit à petit, j’ose !
    Les gens jugent, regardent de travers de toute façon… Moi j’adore quand mes amis me repèrent dans un métro bondé car je porte un manteau rose flashy en plein hiver 😉
    Le style c’est ce que l’on est, être original et créatif et s’enfermer dans un style fait de noir et de blanc (oui toi Karl Lagerfeld!) je trouve cela dommage… Alors bravo d’assumer et de montrer qui tu es !

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    1. Je crois que ma « période » Gossip Girl ne finira jamais vraiment en fait hahaha ! En tout cas merci pour ton commentaire ❤ On est bien d'accord: vive les manteaux rose flashy, et adios le total look noir et blanc!

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  3. Cette combi rose alliée à ces incroyables lunettes de soleil est juste parfaite ! Je suis tellement heureuse que tu aies renoué avec tes désirs premiers, ton originalité et ton unicité, et que la grise Paris n’ait pas eu raison de toi ! Je suis tellement d’accord avec ce que tu dis sur l’énergie de cette ville. C’est assez dingue, avant de lire ton article, j’étais en train de coucher sur le papier mes impressions de cette ville en terme d’énergie, j’étais en train de faire des rapprochements avec des types de personnalités… Et je trouve qu’à bien des égards Paris me fait penser à Geneviève de Fontenay, classique, bien sous tous rapports, froide, distante et un peu chiante. Il y règne cette idée qu’il faut pour s’intégrer (ou pour ne pas s’attirer les foudres des uns et des autres!) se faire le moins remarquer, ne pas rire trop fort, ne pas trop parler, ne pas être trop flashy et rester polie surtout. C’est un truc de dingue. Je viens d’emménager à Paris et ce genre d’énergie me laisse totalement perplexe… Je crois aussi que si l’on a ce déclic comme tu l’as eu, et que l’on reste un peu dans sa bulle tout en laissant un petit espace de générosité pour autrui, on peut totalement conserver et alimenter un style et une façon d’être unique ! Il faut aussi être bien entourée, par une crew qui nous soutienne afin d’oublier les ouvriers de la grisaille passive-aggressive autour de nous ! Super article en tout cas, et un sujet vraiment passionnant qui fait le lien habilement entre psychologie et mode 🙂

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    1. Waaah merci pour ton commentaire aussi parfait et développé – ça me fait tellement plaisir de voir des personnes qui s’impliquent encore dans les blogs et les retours comme tu le fais, c’est si important!

      Mise à part ça, j’ai adoré ta comparaison avec Geneviève de Fontenay hahaha. C’est tellement ça!

      Et j’espère sincèrement que tu vas bien te faire à ta nouvelle vise parisienne ❤

      Des bisous et mille merci !

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  4. Hello Nawal, j’ai découvert ton blog ce soir et, que dire… Il est presque 1h du matin et tu me régales avec tes articles plein d’humour et d’excellents conseils !! J’aime beaucoup ton style, et même si je ne suis pas aussi aventureuse (team noir, noir et noir), tu me donnes envie de ressortir cette jupe rose flashy qui traine dans mon dressing depuis 10 ans et de l’assortir avec une blouse camel qui appartenait à ma grand-mère. Et pour ça, MERCI. Sinon, sache que j’adore dévisager les tenues des gens dans le métro : dans 90% des cas, j’en pense du positif. C’est d’ailleurs ´la raison pour laquelle je fixe les gens : ça m’intrigue et c’est chouette !
    Merci encore pour ton blog, tes bonnes idées et ta bonne humeur 🙂

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